Diptyque d’opéras de chambre
Première
6 juin 2010
Lieu
Théâtre de l’Hôpital Bretonneau (Paris)
“Je voudrais mourir à présent, vite,
Alissa
avant d’avoir compris de nouveau que je suis seule.”
Ce qui a poussé deux compositeurs masculins aussi différents que Robert Schumann et Darius Milhaud à adapter les textes de deux écrivains également masculins pour en faire des monologues féminins, c’est sans doute cette étonnante tradition – courant du Cantique des cantiques au drame naturaliste – d’hommes donnant par l’art la parole à la moitié de l’humanité qui ne l’avait que si rarement. La « voix de femme », autant qu’un genre, devient un instrument particulier, apprécié pour son timbre unique, mais aussi le creuset d’une certaine image de la femme. Adelbert von Chamisso offre des phrases simples et candides à une adolescente amoureuse, qui aspire autant à la passion qu’au confort bourgeois et au mariage (le rêve partagé de Robert et Clara Schumann).
André Gide, en partant de la même situation, imagine dans La Porte étroite une jeune femme qui, plus ambitieuse, écarte peu à peu l’idée du mariage, même d’amour, avec un cousin normalien qui saurait lui offrir confort et sécurité : au bonheur, auquel nous semblons condamnés à devoir aspirer par-dessus tout, elle préfère l’idéal de la sainteté. De ce roman ambigu Darius Milhaud a tiré une cantate mystérieuse, aussi rarement jouée que Frauenliebe und ‑Leben l’est continuellement : ces deux œuvres posent néanmoins la question du regard masculin sur l’intimité féminine ; les mettre en scène sous la forme d’opéras de chambre nous permet de les mieux comprendre et confronter.
Deux vies rêvées de femmes, créé dans le cadre d’une résidence au long cours à l’Hôpital Bretonneau à Paris, était la première collaboration d’Aleksi Barrière et Clément Mao-Takacs, et a posé les fondations de la compagnie La Chambre aux échos. C’était également la première mise en scène d’Alissa de Milhaud dans l’histoire de cette œuvre.
Partie 1 : Amour et vie de femme de Robert Schumann
(1840, poèmes d’Adelbert von Chamisso)
Partie 2 : Alissa de Darius Milhaud
(1913/1931, d’après le roman La Porte étroite d’André Gide)
Équipe créative
Direction musicale et piano
Clément Mao-Takacs
Mise en scène et scénographie
Aleksi Barrière
Interprétation
Sopranos
Marianne Seleskovitch et Sayuri Araida
En images
Programmation
6 – 9 juin 2010
Théâtre de l’Hôpital Bretonneau (Paris)
Quelques échos
8 décembre 2013
Aleksi Barrière et Clément Mao-Takacs sont revenus sur leur processus de travail dans le cadre du colloque international « Milhaud et la voix », organisé par l’Association Les Amis de Darius Milhaud à Aix-en-Provence. L’intervention d’Aleksi Barrière, « Redécouvrir la musique de Milhaud par la scène avec Alissa », peut être retrouvée dans les actes du colloque et sur son blog.